Au Canada, 40 % des femmes disposent d’un revenu familial inférieur de moitié au revenu familial médian. En Estrie, 40 % des femmes immigrantes disposent d’un revenu familial qui équivaut à peine au quart du revenu familial médian (9,000 $ contre 37,742$), alors même que les charges familiales sont généralement plus élevées que celles des familles natives. Pratiquement les deux tiers de la population immigrante vivent dans des conditions générales de pauvreté.

– Bassaletti et al., 2004

Ses débuts…

Le Centre pour femmes immigrantes, organisme à but non lucratif et à vocation socio-communautaire, est issu des communautés culturelles et incorporé depuis le 9 février 1987 en vertu de la partie III de la loi des compagnies du Québec. Toutefois, des services ont été régulièrement donnés à ses membres de manière informelle bien avant la date légale d’incorporation. L’ouverture officielle du Centre a eu lieu le 1er octobre 1987, avec des représentantes de 17 communautés culturelles de la région.

Pour placer le Centre dans son contexte historique, il faut savoir qu’il est le fruit d’une identification commune de plusieurs femmes immigrantes aux prises avec les mêmes difficultés, à savoir : barrières culturelles et linguistiques, détresse en raison de l’éloignement de leur famille et de leurs amis, sentiments dépressifs dus à l’isolement dans la communauté et au manque de repères familiers, aux tensions engendrées par les difficultés financières, aux conflits de générations, aux différentes formes de violences – psychologique ou physique – de la part du mari et aux difficultés d’accès aux services gouvernementaux ainsi qu’aux soins de santé et aux services sociaux.

C’est en constatant ce climat d’adversité que Teresa Bassaletti a décidé de réunir d’autres femmes immigrantes de son entourage et qu’ensemble elles ont voulu unir leurs forces dans l’espoir de se sortir de leur pénible condition, et ce, en dépit des sentiments d’impuissance, de découragement et d’anxiété qui les animaient, et en dépit du manque d’autonomie financière de la majorité.

Leurs multiples échanges ont mis en évidence qu’il y avait une inadéquation entre les services offerts aux personnes immigrantes et la réalité de leurs besoins. Les cours de français n’étaient offerts qu’à une certaine catégorie d’immigrant(e)s et l’approche pédagogique ne tenait pas compte de la réalité socio-affective des femmes ayant vécu des situations traumatisantes. Par ailleurs, il y avait pénurie de services de garde à coût modique, et finalement, le manque patent de représentativité des communautés culturelles dans les diverses instances de pouvoir décisionnel contribuait à renforcer cette inadéquation.

D’autre part, il apparaissait clairement que de nombreuses femmes immigrantes développaient des stratégies inappropriées d’adaptation, du fait de leur ignorance ou de leur méconnaissance de leurs droits, du manque d’informations sur leurs possibilités de perfectionnement professionnel, de l’insuffisance de ressources financières, de l’exclusion du marché du travail, mais aussi de l’adaptation plus lente des parents par rapport aux enfants à un nouveau mode de vie, des problèmes de langue et également de la violence domestique.

Pour contrer ces situations d’adversité, le Centre pour femmes immigrantes s’est fixé comme but fondamental de faciliter l’intégration des femmes immigrantes à la société canadienne, québécoise et estrienne. Le Centre se veut un lieu de partage, où des stratégies concrètes se développent pour résoudre les difficultés des femmes.

Depuis 1987, plus d’une centaine de projets ont vu le jour au sein du Centre pour femmes immigrantes, et ce, afin de faciliter l’intégration des femmes immigrantes de l’Estrie au niveau social, économique et politique. Grâce aux services du Centre, des milliers de femmes immigrantes ont pu bénéficier d’une aide en ce qui a trait à la francisation, à des besoins de traduction, d’interprétariat, à la préparation à la citoyenneté canadienne, aux questions relatives à la pension de vieillesse, mais aussi aux problèmes de violence conjugale, de harcèlement sexuel, de divorce, de difficulté de logement, d’aide à l’emploi, etc.

[Le] statut de nouvelles arrivantes [des femmes immigrantes] les rend plus vulnérables en contexte de violence conjugale : elles connaissent peu leurs droits, leurs recours, les politiques en matière de violence conjugale. Elles ont peu d’argent, dépendent bien souvent du mari et sont souvent isolées. Le changement dans la structure familiale, la pauvreté, le processus migratoire en lui-même avec son lot de pertes et, dans certains cas, la précarité du statut amplifièrent également la vulnérabilité des femmes immigrantes victimes de violence conjugale.

– Agence de la santé et des services sociaux, 2008

Aujourd’hui…

Les dernières statistiques publiées par l’Agence de la santé et des services sociaux rendent compte de la nécessité, encore aujourd’hui, de l’existence du Centre pour femmes immigrantes. L’organisme a depuis ses débuts, augmenté de façon exponentielle le nombre de ses bénéficiaires, qui s’élève en 2010 à 925 membres issus de 70 communautés culturelles différentes. Le Centre pour femmes immigrantes offre des services à près de 2000 immigrants par année.

Soulignons que le Centre pour femmes immigrantes tient compte des réalités distinctes des différentes communautés culturelles, ainsi que des adaptations qu’impliquent ces réalités. Ainsi toutes les activités qu’il propose respectent la diversité de la composition des familles, des milieux, et de la santé psychologique des membres.

Afin de travailler de concert avec les organismes de femmes de la région, le Centre pour femmes immigrantes a tissé, au fil du temps, des liens solides avec divers organismes, tels le CALACS, la Parolière, SOS Grossesse, le Centre de santé des femmes, sans oublier les groupes de femmes anglophones de Lennoxville et divers autres organismes communautaires de la région de l’Estrie. De plus, afin de souligner à chaque année l’importance de l’égalité de fait entre les femmes et les hommes et de rendre compte de la constante progression des femmes en cette matière, le Centre pour femmes immigrantes organise depuis maintenant près de 20 ans la Journée Internationale de la femme où tous les membres de la communauté sont invités à se joindre à la cause.

Le Centre pour femmes immigrantes développe à chaque année de nouvelles stratégies ou de nouveaux moyens pour promouvoir l’intégration des différentes communautés culturelles en région, car il est persuadé que la société québécoise se construit nécessairement avec l’apport des membres de ces communautés. En effet, le Centre pour femmes immigrantes soutient vigoureusement que c’est l’intégration harmonieuse des communautés et la juste mise en valeur de leurs compétences et richesses particulières qui assureront un développement dynamique de la société, contribuant ainsi au rayonnement culturel de la région.